Georges Lavaudant, Éric Elmosnino et Astrid Bas en pleine répétition du “Misanthrope”. NICOLAS NATARIANNI
L’épatant comédien Eric Elmosnino joue le rôle-titre du “Misanthrope” que met en scène le toujours subtil Georges Lavaudant au Domaine d’O, à Montpellier, du 24 au 29 janvier. Il a répondu aux questions de Midi Libre entre deux répétitions.
Comment est né ce nouveau projet de “Misanthrope” ?
Avec Jo (Georges Lavaudant NDLR), on avait déjà travaillé ensemble il y a longtemps. On s’est recroisés il y a peut-être, je ne sais pas, un an, un an et demi, dans un théâtre où je jouais à l’époque. On s’est dit : “Je pensais à toi”, “Moi aussi”, ça nous a fait rire, alors on s’est dit qu’il faudrait qu’on se revoie, qu’on s’en refasse un petit dernier, pour la route, genre. « Ouais, d’accord. » Il m’a rappelé un peu tard, en me demandant ce que je pensais du Misanthrope. “Je ne sais pas, je vais relire”. (rires)
Vous ne lui avez pas alors demandé pourquoi ce Molière, particulièrement ?
Pas besoin. Le Misanthrope fait partie des grandes pièces du répertoire, et Alceste, pour un acteur, c’est un rôle incroyable. Il n’y a pas de question à se poser, faut foncer ; on est heureux. Après, quand le moment de le travailler approche, c’est autre chose ! (rires)
Que raconte pour vous “Le Misanthrope” ?
Mais tellement de choses ! Quand tu le lis, tu te demandes forcément si tu peux avoir des affinités avec ce monsieur, ce jeune homme en vrai. D’ailleurs, je me suis posé la question de l’âge : c’est bien tous les propos qu’il tient, toutes ces convictions, mais c’est mieux si c’est dans la bouche d’un jeune homme de 30 ans qui a la vie devant lui et qui veut une espèce d’absolu de pureté et de radicalité ; ce qui peut être touchant. Après, dans la bouche d’un mec comme moi, on pourrait se dire qu’il a vécu deux trois trucs, donc que c’est bizarre qu’il soit là-dedans. (rires) Mais au final, cela peut être aussi touchant d’une autre façon…
200% Deposit Bonus up to €3,000 180% First Deposit Bonus up to $20,000Après, quant à vous dire précisément ce que la pièce raconte, on en découvre tous les jours de nouveaux aspects. C’est ce qui est formidable avec un classique comme celui-là, si on est sérieux deux minutes : il est plus grand que toi, il sera toujours là quand tu ne le seras plus depuis longtemps, et de nouveaux acteurs vont continuer de s’y frotter. Alors, on essaie de le prendre le plus au sérieux possible, et on verra si, moi, acteur, j’ai la chance qu’il me visite un peu. Cela paraît barjot de dire ça mais, à un texte comme celui-là, tu ne peux pas coller tes idées, tes humeurs, ce serait débile, ça ne marcherait pas. Il faut espérer, limite prier, qu’il daigne venir te dire bonjour !
Georges Lavaudant laisse- t-il soupçonner quel Alceste il espère de vous : inquiétant, ridicule, drôle ?
Normalement, il faudrait qu’il soit tout ça parce que le rôle contient tout ça, ça ne tient pas à Jo, ni à moi. Nous, on essaie d’agrandir le champ des possibles, pour voir jusqu’où ça peut aller sans que ça devienne autre chose. Alceste est constamment en lutte, en rage, contre lui-même, et contre le monde entier ; il est ça mais il n’est pas que ça. Il peut aussi être un enfant désarmé. Il ne parle que de sincérité mais il peut se montrer insincère (avec Oronte, au début, par exemple). Voilà, on essaie de voir jusqu’où on peut aller, en prenant tout au premier degré et en comprenant tout ce qu’on dit (ce qui n’est pas si simple).
Vous vous êtes déjà pas mal frotté à Molière…
… Oui, mais pas à ses pièces en alexandrin, jusque-là, et ça change tout ! Donc mon boulot passe par ça : une déconstruction pour atteindre au sens, et le travail du vers. Il s’agit d’en respecter la musique sans se faire piéger par elle. Il faut réussir à s’appuyer sur cette beauté singulière pour atteindre à quelque chose d’humain. Comme si on était traversé par ces sentiments-là et qu’on ne pouvait les exprimer que de cette manière-là. Ça se bosse, quoi !
Vous, justement, vous semblez bosser tout le temps, théâtre, cinéma, série, et sans exclusive…
Oui, j’ai fait du théâtre privé après avoir fait beaucoup de subventionné. Au cinoche, pareil, dans différentes familles, parce que c’est ce que j’aimais comme spectateur : le cinéma populaire avec ces acteurs que tu as plaisir à retrouver de film en film. Après, je n’ai pas fait que des trucs formidables mais ce n’est pas grave.
On sent que vous aimez bosser…
J’aime bosser ? Pfff… (rires) Oui, bon, c’est vrai, j’aime ça, mais j’aime surtout les histoires, les aventures. Là, par exemple, je n’avais envie de jouer Le Misanthrope à tout prix, ce n’était pas un rêve d’acteur, je ne m’étais jamais dit qu’un jour il faudrait que si ou ça… Non, c’est Jo, c’est ma relation avec lui, l’envie de refaire un bout de chemin ensemble. Après, en y regardant de plus près, comme acteur, on se dit que, quand même, c’est pas mal de faire parfois un peu ses devoirs. Ouais, c’est bien de s’y coller. Et c’est bon ! (rires)
Vendredi 24 (20 h), samedi 25 (20 h), dimanche 26 (17 h), mardi 28 (20 h) et mercredi 29 janvier (20 h). Théâtre Jean-Claude Carrière, Domaine d’O, à Montpellier. 10 € à 30 €. 0800 200 165.