Matt Pokora, Arnaud Ducret et Jérémy Frérot prennent du plaisir et, sympa, en donnent. On prend ! Midi Libre – JEAN MICHEL MART
Le premier tableau est l’occasion d’une revue des effectifs : pour cette édition 2025, ils sont riches… et souriants ! Midi Libre – JEAN MICHEL MART
La troupe des Enfoirés a donné mardi soir le premier de ses sept spectacles à la Sud de France Arena, à Montpellier… en même temps que la dernière de ses répétitions. Pas mal d’à peu près, beaucoup d’à côté, énormément de plaisir sur scène et dans la salle !
“Le cœur y est”. On connaît l’expression. Elle est essentielle. Elle souligne l’enthousiasme de celles et ceux auxquels nous l’adressons pour ce qu’ils font, en même temps qu’elle dit la positivité de notre regard sur eux. Cela n’a l’air de rien mais, en ces temps cyniques et divisés, si l’on est d’accord que le cœur y est, c’est déjà énorme, et si tout se passe bien, le reste suivra. Nous, en tout cas, on a suivi : mardi soir, la Sud de France Arena accueillait, comme le dira Patrick Bruel (en appelant à la complicité du public “pour notre début cahoteux”), “à la fois le premier concert et la dernière répétition” des Enfoirés 2025, et le cœur y était. Au pluriel et au particulier !
Affronter, ne serait-ce que le temps de son approche jusqu’à la plus grande salle de région, un froid de gueux donne déjà du sens à la direction que l’on prend : y aller c’est donner pour ceux qui sont dans le besoin, et ça réchauffe déjà le cœur. À l’intérieur, il va bouillir rapidement : d’abord parce que la salle est (quasi, mardi) pleine, et remplie de sourires, ensuite parce que l’organisation ouvre les festivités par la projection sur un grand rideau d’un best-of des précédentes éditions, projection suffisamment longue pour qu’on bouille d’impatience !
Sept représentations du spectacle des Enfoirés 2025 sont prévus à la Sud de France Arena d’ici le 20 janvier. Midi Libre – JEAN MICHEL MART
Quand enfin le rideau tombe, et que commence par une habile intrication des tubes Entrer dans la lumière (de Patricia Kaas) et Love’n’tendresse (Eddy de Pretto) dans une mise en scène drapée, c’est le défilé. Côté Kaas : Zazie, Santa, Nolween Leroy, Sofia Essaïdi, Claire Keim, Shy’m, Joyce Jonathan, Michèle Laroque, Isabelle Nanty, Claudia Tagbo, Elodie Fontan… Côté De Pretto : Patrick Bruel, Julien Clerc, Gaëtan Roussel, Vianney, Matt Pokora, MC Solaar, Ycare, Jérémy Frérot, Arnaud Ducret, François-Xavier Demaison, Michael Youn… On en oublie, ils reviendront.
D’ailleurs, après le sympathique avertissement susmentionné du doyen Patrick Bruel, les revoilà dans un décor (projeté sur de grands écrans de fond scène) de rue parisienne pour une adaptation malicieuse de Nous voyageons de ville en ville (tirée des Demoiselles de Rochefort). “Pourquoi tu chantes comme ça ?” demande l’un, sapé en technicolor, en respectant l’air. “Pour faire comme dans les films de Jacques Demy” lui répond l’autre sur le même ton. Conclusion : “Ça va être un peu long”. Même pas ! En outre, personne ne maîtrisant encore parfaitement la (petite) chorégraphie, le tableau est d’une approximation savoureuse. Mais, devinez… oui, le cœur y est !
Des chansons en solo aux interplateaux
Il y est toujours pour La bonne musique (Michel Berger). Les interprètes se répartissent désormais sur plusieurs niveaux d’architectures métalliques, façon squelettes de building. Claudio Capéo est tout en haut au piano, Vianney à la basse et Arnaud Drucet à la batterie… même si l’orchestre, discrètement installé côté jardin veille au grain musical. Bon, de ce point de vue (car notre oreille a un point de vue, voyez-vous), c’est un peu mollasson ce soir-là mais on se régale des bonnes bouilles des artistes, clairement contents d’être là, et on apprécie l’élégance de Claire Keim dans sa descente des marches.
200% Deposit Bonus up to €3,000 180% First Deposit Bonus up to $20,000Le premier “temps mort” important nous offre le premier de ces moments qu’on ne verra pas sur le DVD que l’on ne manquera pas d’acheter (car, Michael Youn le rappellera plus tard, “Un CD ou un DVD, c’est 17 repas distribués !”) et qui font la singularité de la soirée : Matt Pokora propose en solo une version gymnastique, en haut, en bas d’A nos actes manqués de Fredericks Goldman Jones. La salle se régale. Désormais, ce sera systématique : après chaque tableau nécessitant un changement de décors et de costumes, un ou plusieurs Enfoirés viendront prendre le micro et la lumière pour un tube, un sien ou un autre. J’te l’dis quand même par Patrick Bruel en guitare-voix. Belle par François Xavier Demaison, Ycare et Patrick Fiori. Makeba par Jain. Caroline par MC Solaar. Fous ta cagoule par Michael Youn. Speed par Zazie. Recommence-moi par Santa. Celui qui part par Joseph Kamel. Si j’avais su par Claudio Capéo. Le fou et le roi par Ycare (sur la mélodie de Viva la vida de Coldplay). J’t’emmène au vent par Gaëtan Roussel. C’est délicat à avouer mais facile à comprendre : il s’agira toujours des interprétations les plus impeccables. Basées sur l’interaction avec la salle, elles seront en outre celles où l’on aura mis le plus de “chœur” à l’ouvrage !
Des mises en scène “plus sobres”
Néanmoins, on est venu pour Au pays des Enfoirés ; un “grand spectacle” avait promis sa directrice artistique Anne Marcassus dans les colonnes de Midi Libre, avec des mises en scène “plus sobres”. Démonstration sur Animaux fragiles (Zaz) : dans une ambiance nuageuse, au milieu de buildings couleur albâtre, MC Solaar vole jusqu’aux cieux (est élevé par des câbles quasi invisibles jusqu’aux cintres donc) tandis que ses camarades Patrick Bruel, Sofia Essaïdi, Claire Keim et Vianney chantent bellement. Pour un nouveau emmêlage de chansons, italiennes cette fois (Sarà perché ti amo de Ricchi E Poveri et Ti amo d’Umberto Tozzi), difficile de faire plus sobre, et clair, qu’un décor et des sapes tricolores vert-blanc-rouge même si on n’a rien compris au coup de la baignoire.
Zazie nous refait le coup de l’élévation céleste sur Avec le temps (Léo Ferré) mais cette fois, c’est la faute aux ballons (charbonneux, évidemment ; pour mémoire, ce n’est pas la chanson la plus fendarde du répertoire français) que ses collègues Claire Keim, Amel Bent et Sofia Essaïdi. Les arrangements sont un peu lourds mais les ballons, légers alors Zazie décolle et l’émotion aussi. Un peu plus loin, une chanson de Patrick Bruel poursuivra, dans d’un tour de table (et inversement), la réflexion sur un mode plus… bruélien : Pas eu le temps. Joseph Kamel, Jérémy Frérot et Vianney ajouteront aussi leur grain de sel (et leur petite larme : la reprise est belle) à l’interrogation existentielle avec Maintenant, une chanson du dernier nommé donne lieu à un intrigant tableau : de superbes portraits d’aînés sont projetés sur des voiles, tandis que le fond de scène est occupé par une foule dense de personnes encapuchées de noir et ceinturées de rouge.
Des grands et beaux moments
Bien sûr qu’il y aura des tableaux plus joyeux. Plein de paillettes, de sequins et de dorures sur C’est la même chanson, la fameuse franchouillardisation du tube des Four Tops signée Claude François. Plein de sautillements et d’onomatopées sur Clic clic pan pan, la chanson “ver d’oreille” de Yanns. Ou plein de tambours, de néons multicolores et de cafouillages chorégraphiques (mais le cœur y était, croyez-nous !) Mais rien à faire, on leur préfère L’enfer de Stromae, chanté par Claudio Capéo et Gaëtan Roussel au milieu d’un chœur très dense, anonymisé derrière un même dessin schématique de visage, dont on découvre bientôt qu’il s’agit de l’entièreté des Enfoirés. Arrangements, interprétation, mise en scène, c’est magistral et bouleversant.
Il n’empêche, le grand moment de cet Au pays des Enfoirés restera à n’en pas douter le long passage consacré aux Jeux Olympiques. On se souvient que l’an dernier, les Enfoirés, enfin un, en particulier (on balance : Michael Youn) s’était gentiment moqué de l’alors futur événement, notamment de ses épreuves dans la Seine… Tony Estanguet apparaît en duplex (nous faut-il préciser que c’est un faux duplex ?) sur un écran géant et interpelle le coquin, exigeant de lui des excuses, de vraies excuses. Dont acte avec un tour de la fosse avec la flamme olympique (ou presque) tandis que sur la scène, la Tour Eiffel est aux couleurs olympiques au bout de Champs-Elysées couverts de pancartes des Restos du cœur ! Dans la foulée, quelques camarades débarquent en canoë en fredonnant “Elle est à toi, cette chanson, toi le sportif qui l’an dernier s’est fait chambrer par les Enfoirés” sur l’air de Chanson pour l’Auvergnat (Georges Brassens). Puis d’autres pour “Lors des JO en ville” (Quand on arrive en ville, Starmania). Puis d’autres encore pour “Quand on a le ping-pong à offrir en partage” (Quand on a que l’amour, Jacques Brel). C’est un festival ! Bon, ce soir-là, les frères Lebrun brillent par leur absence, mais l’essentiel c’est qu’ils brillent ! Et le passage de s’achever par une pensée de Michael Youn pour la Californie : “Vous allez bien galérer sans Tony Estanguet”.
En fait, non, le vrai grand moment, le plus beau, le plus important suit l’enchaînement très bien vu entre Ensemble d’Aliocha Schneider (avec cette phrase à méditer : “Qu’est-ce que ça veut dire d’être ensemble si l’on n’est pas ensemble ?”) et l’hymne 2025 des Enfoirés, Le monde demain (“On construira le monde demain. On ne sera pas toujours d’accord. Mais du moment qu’on s’aime encore. On construira le monde demain. A nous de changer le décor, sans peur on est bien plus fort”). Toute la troupe des Enfoirés est alors réunie, et rejointe par des bénévoles des Restos du cœur pour entonner l’hymne écrit par Jean-Jacques Goldman. Haut les choeurs, scène, salle confondues, pour gueuler encore et encore qu’“aujourd’hui on n’a plus le droit, ni d’avoir faim, ni d’avoir froid. Dépassé le chacun pour soi. Quand je pense à toi, je pense à moi”. Alors, au terme de ces quatre heures d’un spectacle encore plein de petites maladresses mais pour cela plus humain que jamais, puisque l’erreur l’est, et que chacun y aura mis tout son coeur, on est reparti le nôtre gonflé à bloc. “On compte sur vous” pour que les Restos le soient aussi !
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