Philippe Durand donne la parole aux paysans du Larzac. – Jean-Joseph Osty
Philippe Durand présente le spectacle Larzac, à l’université Vauban, accueilli par l’ATP de Nîmes.
Larzac ! ne raconte pas comme on pourrait s’y attendre la lutte des années 1970…
Oui, cela raconte ce qui se passe aujourd’hui. Il existe un outil de gestion collective des terres agricoles, qui est l’un des fruits de la lutte. L’État, dans son projet d’extension du camp militaire annoncé au début des années 1970, avait petit à petit acheté des terres. À la fin de la lutte, quand Mitterrand a abandonné ce projet d’extension, l’État était propriétaire de 6 300 hectares.
Que faire de ce territoire ? Les paysans et les habitants ont proposé de le gérer collectivement et c’est ce qui se passe depuis 40 ans maintenant. C’est exemplaire à tous points de vue, en premier lieu parce que c’est le seul endroit où il y a plus de paysans aujourd’hui que dans les années 1980.
Comment avez-vous découvert cette histoire ?
En allant jouer là-bas. J’ai créé un spectacle sur le même procédé, en interviewant les gens et en construisant une petite forme à partir des paroles brutes récoltées. Le projet était autour de la lutte sociale des ouvriers de FraLib à côté de Marseille. Je suis allé jouer au marché paysan de Montredon, l’été 2018. Je connaissais l’histoire de la lutte mais j’ignorais totalement l’existence de cet outil. J’ai rencontré des gens, j’ai posé des questions…
Comment s’est passée l’écriture ?
Les interviews se sont passées d’octobre 2020 jusqu’en juin 2021. J’ai rencontré une quarantaine de personnes. Je récolte cette parole, j’écoute tout, je retranscris ce qui semble potentiellement intéressant. J’ai une énorme matière que je classe, que j’essaie d’organiser… Ensuite, je constitue un récit avec uniquement ces paroles brutes, je ne parle jamais en mon nom.
200% Deposit Bonus up to €3,000 180% First Deposit Bonus up to $20,000À la fin, je retourne aux bandes enregistrées pour que dans l’interprétation je sois au plus proche de la parole. L’ossature de mon travail artistique, c’est l’amour de cette langue, dans sa musicalité, dans son côté brut et poétique.
Vous vous effacez au maximum derrière ces mots…
Ce n’est pas conscient. On me dit qu’on voit apparaître les personnages. J’ai un grand amour et une grande admiration pour toutes ces personnes dont je porte la parole.
Quelles sont les leçons que donnent ces paysans pour aujourd’hui ?
Elles sont multiples. Cela parle de leur agriculture paysanne, mais ce sont des réflexions qui touchent tout le monde, qui sont universelles : notre rapport à la propriété, au collectif, au partage du commun, à la transition. Nous sommes dans une époque où beaucoup d’anciens qui ont construit ce système arrivent à la retraite. Des jeunes reprennent mais ils n’ont pas forcément la même façon de voir les choses. Et ça, c’est universel, notamment dans le théâtre. Cette acceptation est compliquée, c’est l’histoire de la tragédie, les jeunes qui poussent les vieux qui ne veulent pas partir.
On ne nous apprend tellement pas l’aventure du collectif, la difficulté de la démocratie. Par l’éducation, le management, on est dans l’individualisme. Eux, ils ont 40 ans dans cette histoire-là.
Ce ne doit pas être toujours facile. Évoquent-ils aussi les difficultés ?
Bien sûr. C’est d’ailleurs la première réaction qu’ils ont eue quand ils ont entendu mon histoire. Ils étaient soulagés de dire que ce n’était pas que le rêve. Mais depuis qu’ils ont vu le spectacle, ils ont des retours. En le voyant, ils se rendent compte quand même de la chance qu’ils ont. Même si c’est dur, c’est tellement de satisfaction de parvenir à faire vivre cet outil pendant 40 ans. On qualifie vite ce type d’aventure d’utopie, sauf que le Larzac, c’est de l’utopie réalisée. Ce n’est plus de l’utopie, c’est du concret.
Dans le titre Larzac !, il y a un point d’exclamation. Que veut-il dire ?
Dans le monde agricole qu’on connaît, on ne parle jamais de cette expérience. Plein de gens, plein de paysans ignorent totalement cette histoire, moi le premier quand j’y suis allé et même dans les milieux militants. C’est pour ça qu’il y a un point d’exclamation, parce que je trouve ça dingue. Mais on est dans une société capitaliste qui n’a pas envie de promouvoir ce genre d’aventures.
Jeudi 12 décembre, 19 h. Université de Nîmes, site Vauban, 5 rue du Docteur-Georges-Salan, Nîmes. 20 €, 10 €. 04 66 67 63 03.
Le spectacle Larzac ! sera également accueilli par l’ATP d’Uzès en 2025. Vendredi 4 avril, 20 h 15 à la salle des fêtes, Vallabrix. Samedi 5 avril, 20 h 15 à la salle des fêtes, Sanilhac. Dimanche 6 avril, 17 h, salon Racine, hôtel de ville, Uzès. 10 €. 04 66 03 14 65.
Philippe Durand reprend également son spectacle 13.36 (paroles de FraLib), mercredi 5 mars 2025, 20 h, médiathèque, 520 avenue des Abrivados, Lunel (Hérault). Gratuit sur inscription. 04 67 99 06 51.
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