Ce que votre verre de vin rouge ne vous dit pas, la science, elle, s’en charge.
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© AS Photography / Pexels 𝕏
L’alcool, et surtout le vin rouge, occupe une place unique dans notre patrimoine culturel et gastronomique. Son histoire remonte à l’arrivée des Phocéens à Marseille, il y a plus de 2600 ans, marquant le début d’une tradition viticole qui allait transformer nos terroirs et notre art de vivre. Même si les vins bus par nos aïeuls de la période antique n’avait pas grand-chose à voir avec ceux que l’on consomme actuellement, le vin rouge reste plébiscité sur notre territoire. Selon Statista, en 2022, 57 % des Français préférait le rouge par rapport à ses homologues blancs (40 %), rosés (29 %) ou pétillants (26 %).
Seulement, cela n’a sûrement pas échappé à certains d’entre vous, la consommation de vin rouge peut donner mal au crâne, sans parler de gueule de bois au sens strict du terme. Un phénomène un peu moins glorieux associé à la consommation de vin rouge, qui peut survenir même sans abus. D’où viennent donc ces céphalées ?
La recherche des responsables de ces maux de crânes a longtemps focalisé l’attention sur plusieurs composés du vin rouge. Les sulfites, depuis leur mention obligatoire sur les étiquettes américaines dans les années 1990, ont longtemps cristallisé les inquiétudes. Ce sont des composés soufrés naturellement présents dans le raisin, mais ils sont également ajoutés au vin par les vignerons pour plusieurs raisons : empêcher l’oxydation du vin, le protéger de la prolifération des bactéries et s’assurer qu’il conserve ses arômes.
Cette suspicion s’est rapidement étendue à d’autres composés comme les amines biogènes (composés azotés produits par certaines bactéries présentes dans le vin) et les tanins (molécules présentes dans le raisin qui donnent au vin sa structure, son astringence et sa capacité à vieillir), créant un véritable catalogue de coupables présumés. Pourtant, ces accusations reposaient sur des fondements fragiles.
L’examen du rôle des sulfites dans notre organisme révèle une réalité bien différente. Ce dernier en produit naturellement 700 mg de sulfites quotidiennement, une quantité nettement supérieure aux 20 milligrammes contenus dans un verre de vin. Les sulfites oxidases, enzymes spécialisées, assurent efficacement leur transformation en sulfate, invalidant leur rôle présumé dans l’apparition des maux de tête. De plus, la présence équivalente de sulfites dans les vins blancs, rarement associés aux céphalées, affaiblit davantage cette hypothèse.
200% Deposit Bonus up to €3,000 180% First Deposit Bonus up to $20,000Les amines biogènes, composés présents dans de nombreux aliments fermentés, ont également fait l’objet d’investigations. Bien que capables de provoquer des maux de tête, leur concentration dans le vin rouge reste trop faible pour expliquer les symptômes observés. Quant aux tanins, leur présence dans d’autres aliments comme le thé ou le chocolat, consommés sans provoquer de céphalées similaires, remet en question leur implication directe.
La véritable explication réside dans une interaction biochimique entre l’alcool et un composé phénolique spécifique : la quercétine. C’est un pigment naturel du raisin, qui joue un rôle clé dans la complexité aromatique des vins, apportant des nuances florales et fruitées ; lors de la maturation du vin, celle-ci est libérée, ce qui lui donne aussi sa couleur.
Le métabolisme de l’alcool (éthanol) s’effectue selon un processus en deux étapes distinctes, chacune impliquant des mécanismes enzymatiques précis. Dans un premier temps, l’éthanol se transforme en acétaldéhyde, une molécule potentiellement toxique. La seconde étape, catalysée par l’enzyme ALDH (aldéhyde déshydrogénase), convertit ensuite cet acétaldéhyde en acétate, une substance inoffensive pour l’organisme.
Cette recherche publiée en 2023 dans la revue Nature a démontré que la quercétine, particulièrement abondante dans la peau des raisins rouges, interfère spécifiquement avec cette seconde étape en bloquant l’activité de l’ALDH. Cette découverte résulte d’analyses enzymatiques menées in vitro, qui ont permis d’évaluer l’impact de différents composés phénoliques sur l’activité de l’ALDH. La quercétine glucuronide, forme sous laquelle la quercétine est métabolisée par le foie, s’est révélée être l’inhibiteur le plus puissant de cette enzyme clé.
Cette interaction provoque une accumulation d’acétaldéhyde dans l’organisme, déclenchant une cascade d’événements inflammatoires. Ce phénomène explique non seulement les maux de tête, mais également les rougeurs faciales que certaines personnes expérimentent après la consommation de vin rouge. La variation génétique dans l’efficacité de l’ALDH entre les individus explique par ailleurs pourquoi certaines personnes sont plus sensibles que d’autres à ces effets.
En revanche, la quercétine seule, présente dans de nombreux aliments comme les pommes, les choux ou les câpres, ne provoque pas de céphalées. C’est son association avec l’alcool qui déclenche le mécanisme problématique. La teneur en quercétine varie selon l’exposition des vignes au soleil : les raisins plus ensoleillés en produisent davantage. Les crus plus légers, souvent issus de vignes moins exposées, pourraient constituer une alternative plus douce pour les personnes sensibles. Si vous êtes concerné par ce mal, évitez alors les Bordeaux, Côtes du Rhône (notamment les Grenache, Syrah, Mourvèdre) et préférez-leur des vins rouges fruités et légers. Pinot Noir, Gamay ou cabernets francs de la Loire, par exemple. Le tout, avec modération, bien entendu.
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