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TÉMOIGNAGE. “La misère est à la vue de tout le monde” : un Gardois qui vit à Mayotte raconte les dramatiques conséquences du cyclone Chido

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Le bilan actuel fait état de 39 morts et plus de 4 000 blessés. MAXPPP – HANDOUT

Originaire de Lasalle, dans les Cévennes, Gabin Bouchez, 25 ans, habite à Mayotte depuis 2022. Le jeune homme était face au cyclone Chido lors de son passage, samedi 14 décembre.

Quinze jours après, Gabin Bouchez continue de regarder l’île jusqu’à l’horizon : “Il n’y a plus de forêts. Il n’y a plus rien.”

Arrivé à Mayotte il y a deux ans, le jeune homme de 25 ans dont les racines remontent à Lasalle, dans les Cévennes gardoises, où vivent ses parents, a vécu, comme les quelque 320 000 autres Mahorais, le passage violent du cyclone Chido, samedi 14 décembre. Jeune diplômé en architecture après des études à Montpellier et à La Réunion, Gabin Bouchez s’est installé ici, travaillant pour un cabinet d’architecture implanté sur les deux départements.

Actuellement, sur l’ïle, Gabin Bouchez peine à joindre la métropole, à cause de l’absence de réseau. L'atelier architectes et ingénieurs

“C’était du jamais vu”

“Les premiers avertissements concernant le cyclone sont arrivés le 10 décembre.” Contrairement à La Réunion, qu’il connaît bien et où il a déjà vécu des alertes cycloniques, Mayotte est beaucoup moins la cible des tempêtes tropicales. “Les bâtiments, sans parler des bidonvilles, ne sont pas adaptés.” Tout comme les habitants : “Beaucoup de personnes n’y croyaient pas trop, ou n’imaginaient pas ce que ça pouvait être. D’autres, les personnes en situation irrégulières, ne se sont sans doute pas rendues dans les abris de peur de se faire expulser par la suite.”

Pourtant, malgré ses précautions, Gabin Bouchez ne s’attendait pas, lui non plus, à un cyclone aussi puissant. “Le dernier cyclone réunionnais aussi puissant remonterait à 1962. Autant dire qu’à Mayotte, c’était du jamais vu.”

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Le 14 décembre, jour de la tempête, les vents ont commencé à “souffler sérieusement” dès 7 h 30. Avec son colocataire, dans leur maison située à Majicavo Lamir, au nord de Mamoudzou, il voit arriver Chido au loin. Très vite, la maison se met à trembler, les arbres tombent. L’un d’eux s’effondre sur une partie du toit. Les grilles d’entrée s’arrachent et sont projetées sur les fenêtres. La pluie, en trombe, a raison de la toiture. “Le faux plafond s’est effondré sous l’eau : il n’a pas tenu.” Pendant “plus d’1 h 30”, les deux hommes ont maintenu, “comme on a pu”, une baie vitrée de l’habitation. “Là, on a eu peur.” Par chance, ils s’en sortent indemnes.

Sans domicile

Le lendemain, les deux colocataires se résignent à quitter leur maison, inhabitable. “On avait aussi peur des cambriolages.” Leur logement sera, en effet, cambriolé quelques jours plus tard : plusieurs outils, dont une tronçonneuse et leurs harpons de pêches, disparaîtront.

“Sur les cinq jours qui ont suivi, on a dormi chez cinq personnes à chaque fois.” L’amitié et la générosité leur ont souri. À présent, Gabin Bouchez, avec d’autres amis, a trouvé refuge chez un ami dont la maison a tenu face au cyclone, au sud de Mamoudzou. “On vit désormais un peu au jour le jour.”

Quinze jours après, l’électricité est enfin revenue dans les logements, “après 10 jours de coupure”. Mais l’essence, le réseau téléphonique, internet et l’eau courante, dont la distribution était déjà catastrophique avant le drame, manquent toujours cruellement malgré l’accès aux pilules permettant de la purifier.

“On est censé être un pays riche”

Depuis, Gabin Bouchez aide les autres comme il peut, “avec une amie qui travaille pour une association humanitaire.” Et là, il assiste à l’ampleur du désastre. “Dans certains quartiers, nous étions les premières personnes extérieures à aller voir les habitants. Aucun pompier ni médecins ne s’y étaient rendus avant nous.” À de nombreux endroits, “des sinistrés ont faim, soifs, sont blessés. Et la pluie recommence à tomber alors qu’ils n’ont plus d’abris.”

Un désastre qui met à jour, pour lui, la misère des lieux : “Avant, la misère de Mayotte, on n’en voyait qu’un quart. Les bangas (bidonvilles, NDLR) étaient pour beaucoup cachés par les arbres. Là il n’y a plus rien. La misère est à la vue de tout le monde.” Ce qui accentue son incompréhension : “On est censé être un pays riche. Là, le 101e département de France est délaissé.”

Coupé du flux d’informations, le jeune homme sait qu’une partie du nouveau gouvernement, dont le Premier ministre François Bayrou et le ministre des Outre-mer Manuel Valls, doit atterrir ici ce dimanche 29 décembre. Au-delà de la politique, Gabin espère que le drame permettra enfin de voir l’île se développer comme tout département français. “J’espère qu’il y aura, enfin, plus d’habitants insalubres à Mayotte, que l’île ne soit plus ce réservoir à misère.”

C’est aussi pour cela qu’il avait choisi, il y a deux ans, de s’y rendre. Et qu’il a choisi, après Chido, d’y rester. “Au début, je songeais à rentrer en métropole pour voir ma famille à Noël. Mais d’un autre côté, on est venu ici pour développer Mayotte. Elle a besoin de monde pour ça. Partir maintenant, après un tel désastre, c’est presque contradictoire.”

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Teilor Stone

Teilor Stone has been a reporter on the news desk since 2013. Before that she wrote about young adolescence and family dynamics for Styles and was the legal affairs correspondent for the Metro desk. Before joining Thesaxon , Teilor Stone worked as a staff writer at the Village Voice and a freelancer for Newsday, The Wall Street Journal, GQ and Mirabella. To get in touch, contact me through my teilor@nizhtimes.com 1-800-268-7116

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